Les corridors de transport efficace : facteur de développement de l’économie bleue en Afrique Francophone.

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12 mars 2021
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Les corridors de transport efficace : facteur de développement de l’économie bleue en Afrique Francophone.

[[1]] Avant la crise de la Covid-19, dans son rapport « West Africa Container Trade (2018) », le groupe Dynamar prévoyait pour 2021 une croissance annuelle de 5% du volume de conteneurs en Afrique de l’Ouest qui atteindra 4.3 millions d’EVP. Les gouvernements et leurs partenaires ont alors massivement investi dans la modernisation des ports pour se préparer à absorber ce trafic. Plusieurs ports se sont dotés de terminaux en eaux profondes et la lutte pour le statut d’hub régional s’est engagée. D’importants travaux ont été entrepris à Lomé, Abidjan, San Pédro, Tema, Takoradi, Dakar, Lagos, Kribi, Owendo, Pointe-Noire, etc. Des projets ont vu le jour à Lekki au Nigeria et N’Dayane au Sénégal.

Il apparaît donc que [[2]] dans le commerce international avec les pays de l’hinterland, le tronçon maritime est sous contrôle. De plus, les ports africains se sont hissés au niveau des standards internationaux grâce aux partenariats public-privés avec des exploitants portuaires d’envergure : PSA, DP Word, MSC, APM Terminals, Bolloré, etc.

Cependant, [[3]] si le versant portuaire a fait sa mue à travers l’Afrique depuis une douzaine d’années, pour répondre aujourd’hui globalement aux attentes de ses utilisateurs, tout reste à faire une fois franchies les clôtures des terminaux, lorsqu’il s’agit de desservir l’hinterland.

[[4]] Les investissements en effet, ont été concentrés dans les ports, délaissant les corridors. Or, un port excelle par sa connectivité et la profondeur de son arrière-pays qui lui permet de pénétrer le plus loin possible.

Ainsi, malgré les investissements consentis dans les ports et qui ont permis de réduire la durée du passage portuaire, d’augmenter le tirant d’eau, d’optimiser les opérations, [[5]] la digitalisation portuaire comme moyen d’accélérer les échanges internationaux avec l’Afrique ne suffira pas si elle n’est pas combinée à l’élaboration de corridors performants.

[[6]] En Afrique, en général, la faiblesse des chaînes logistiques se situe au niveau terrestre (pré et du post-acheminement).

[[7]] « L’interface entre une ville et son port pose souvent problème », a déjà plusieurs fois confirmé Philippe Labonne, le directeur général adjoint de BTL, qui cite parmi d’autres les exemples de Pointe-Noire ou de Lagos.

La Cnuced a calculé que, s’il fallait en moyenne huit heures pour évacuer un conteneur d’un port japonais ou allemand, la même opération prenait dix fois plus de temps au Nigeria et au Sénégal, douze fois plus au Kenya. Conscients du problème bien avant la crise sanitaire, les autorités publiques africaines comme les opérateurs internationaux privilégient dorénavant les implantations portuaires hors des grandes capitales.

À Djibouti et à Tanger, les derniers terminaux ont été construits loin des agglomérations engorgées. Au Sénégal, DP World a jeté son dévolu sur le site de Ndayane, situé à une cinquantaine de kilomètres de Dakar. En Côte d’Ivoire, MSC a misé sur San Pedro pendant que CMA CGM choisissait Kribi au Cameroun.

Ces nouvelles interfaces portuaires, aux dimensions toujours plus démesurées pour faire face à l’explosion des volumes provoquée par celle attendue de la démographie à travers le continent, sont également équipées de vastes zones multimodales de stockages et de distribution, comme à Vridi pour BTL, afin d’accompagner le développement du futur TC2 d’Abidjan ou à Nkok pour Olam, en arrière-plan du terminal gabonais d’Owendo.

[[8]] À l’import, les marchés nationaux sont incapables d’absorber la totalité des capacités des ports, d’où la nécessité de disposer de corridors performants reliant les pays de l’hinterland pour y acheminer une partie du fret transbordé. Ces corridors sont également utiles pour l’exportation de produits agricoles et autres minerais depuis les régions et pays enclavés.

Il faut donc un réseau terrestre structurant, efficace et sécuritaire. Ces conditions n’étant pas garanties, les économies réalisées sur le tronçon maritime par les chargeurs des pays de l’hinterland se perdent dans l’absence de corridors performants.

Par exemple, le Cameroun a beaucoup d’atouts mais son potentiel en logistique de transport reste faible et les coûts logistiques élevés. Il est classé 118 ème sur 138 pour la qualité de ses infrastructures. Il gagnera à améliorer entre autres, les corridors Douala/N’Djamena et Douala/Bangui par lesquels transitent les échanges du commerce extérieur du Tchad et de la Centrafrique. En plus d’accroître les échanges, les retombées économiques des nouveaux investissements à consentir profiteront aux trois pays.

En Afrique de l’ouest, c’est le statut quo pour le projet de corridor routier prévu pour relier Abidjan à Lagos en passant par Cotonou, Lomé et Accra.

Il est nécessaire de positionner les ports au cœur d’un réseau multimodal efficace. Cette multimodalité doit mettre l’accent sur le transport intermodal et le ferroutage. Les grands volumes et les grandes distances justifient le transfert modal vers le train. Le rail a plusieurs avantages : économies d’échelle, réduction des accidents de la route, évitement de milliers de tonnes de gaz à effet de serre.

Plusieurs projets évoqués depuis longtemps sont « en panne ». C’est le cas du corridor mer/rail « Épine dorsale » prévu pour relier le Bénin au Niger. Des centaines de milliers de tonnes de matières dangereuses (souffre, engrais, etc.) et d’engins lourds continuent à circuler sur la RN1 pour relier le port de Cotonou à Arlit au Niger. Le projet de boucle ferroviaire ouest-africaine n’a toujours pas vu le jour non plus. Son protocole a été signé en janvier 1999.

Pour conclure, il y a une multitude de projets de corridors en souffrance. Malgré d’importants investissements dans les infrastructures portuaires, les chaînes logistiques ne sont pas performantes à cause du manque de corridors multimodaux pour desservir les hinterlands. Le transport terrestre demeure le parent pauvre. Les gouvernements gagneront à concevoir, avec l’appui des ressources compétentes, des réseaux logistiques et de véritables plans de mobilité durable des marchandises en transit.

[[9]] De telles infrastructures, en fluidifiant les approvisionnements, doivent assurer le développement d’une industrie de transformation en Afrique, dont la valeur ajoutée créée justifiera les investissements souvent substantiels à réaliser.

« L’Afrique importe chaque année pour près de 50 milliards de dollars de denrées alimentaires qu’elle pourrait produire elle-même », rappelle Karim Aït-Talb, directeur général délégué de Geocoton.

À condition de disposer d’une chaîne logistique suffisamment efficace pour accélérer la constitution d’espaces économiques régionaux qui doperont les échanges intra-africains, encore limités à 12 % (contre 60 % en Europe et 40 % en Asie).

Les experts de l’Afreximbank assurent déjà depuis plusieurs années que le développement de ce commerce interne « constitue pour l’Afrique le moyen le plus sûr de se protéger des chocs économiques extérieurs ». C’est en suivant cette logique que la logistique tisse sa toile à travers le continent.


[1] https://portsetcorridors.com/2020/defis-logistiques-afrique-corridors-efficaces/

[2] https://portsetcorridors.com/2020/defis-logistiques-afrique-corridors-efficaces/

[3] https://www.jeuneafrique.com/mag/1019989/economie/bataille-de-marches-a-lassaut-de-lhinterland-africain/

[4] https://portsetcorridors.com/2020/defis-logistiques-afrique-corridors-efficaces/

[5] https://portsetcorridors.com/2020/defis-logistiques-afrique-corridors-efficaces/

[6] https://portsetcorridors.com/2020/defis-logistiques-afrique-corridors-efficaces/

[7] https://www.jeuneafrique.com/mag/1019989/economie/bataille-de-marches-a-lassaut-de-lhinterland-africain/

[8] https://portsetcorridors.com/2020/defis-logistiques-afrique-corridors-efficaces/

[9] https://www.jeuneafrique.com/mag/1019989/economie/bataille-de-marches-a-lassaut-de-lhinterland-africain/

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